Conférence : Jules Massenet, au tournant d’un siècle…

par / Vendredi, 09 février 2018 / Publié dans Actualité
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Jules MASSENET

(1842-1912)

Au tournant d’un siècle…

 

 

 

Conférence présentée par Hervé OLEON

Lundi 5 mars 2018 à 17h30
Auditorium du Conservatoire Lili et Nadia Boulanger 17, rue de Rochechouart – 75009 PARIS

 

Massenet fut le plus réellement aimé des musiciens contemporains. C’est d’ailleurs bien cet amour que l’on a eu pour Massenet qui lui créa du même coup la situation particulière qu’il n’a cessé d’occuper dans le monde musical. Ses confrères lui pardonnèrent mal ce pouvoir de plaire qui est proprement un don (…).On l’a beaucoup imité, aussi bien à l’extérieur qu’à l’intérieur… Tâcher de faire tomber ceux que l’on imite est le premier principe de la sagesse chez certains artistes, qui nomment ces manœuvres blâmables « lutte pour l’art ». Cette expression si souvent employée à quelque chose de louche et, au surplus, le défaut d’assimiler l’art à un sport quelconque. En art, on n’a à lutter le plus souvent que contre soi-même, et les victoires que l’on y remporte sont peut-être les plus belles…

Claude Debussy, Monsieur Croche, antidilettante Nouvelle Revue française (Les Bibliophiles Fantaisistes), 1921 (pp. 62-65).

 

Présenter les grandes lignes de l’œuvre et de la vie de Jules Massenet, tel est l’objectif poursuivi par cette conférence…

Au-delà d’un simple passage en revue chronologique, il s’agit ici de démontrer que Massenet n’est pas l’image figée du siècle qui l’a vu naître. Il est une projection, un trait d’union vers le siècle qui le verra mourir. Il se trouve par là-même à la charnière de deux époques, entre classicisme et modernité.

De son œuvre immense – 475 titres aujourd’hui référencés – la postérité oublieuse n’aura guère retenu que ses ouvrages lyriques, en particulier Manon, Werther et, dans une moindre mesure Thaïs, par l’intermédiaire de la célèbre méditation pour violon solo, chœur et orchestre. L’œuvre de Massenet, ce sont pourtant 26 opéras, 4 oratorios, des suites pour orchestre, des ballets, des musiques de scène, des pièces pour piano et 285 mélodies connues…

Mais la quantité ne saurait témoigner d’une quelconque valeur si elle n’était doublée de qualités certaines. A l’aube d’une ère artistique nouvelle, Massenet a bien compris la nécessité d’évoluer sans cesse. Il cherche, il expérimente, ouvrant ainsi la voie à ceux qui lui succèderont. Respectueux des usages de l’Ecole musicale française, il ne se prive cependant ni d’inspirations verdiennes, véristes ou wagnériennes, ni de l’utilisation de procédés novateurs.

Ne lui doit-on pas, dès 1874, dans Eve, l’introduction du saxophone à l’orchestre, pratique renouvelée en 1877 dans Le Roi de Lahore, puis en 1881 dans Hérodiade ? N’a-t-il pas révolutionné l’opéra-comique avec Manon, en substituant aux traditionnels intermèdes parlés des mélodrames? Ne fut-il pas le premier compositeur français à pratiquer la «musique électronique » avec l’utilisation d’un énigmatique « électrophone » dans le poème symphonique Visions ? Ethnomusicologue à sa manière, en quête d’authenticité, il a réintroduit des instruments oubliés ou inusités : percussions antiques dans Thaïs, trompettes romaines et médiévales dans Hérodiade et Le Cid, darboukas dans Cléopâtre, clavecin dans Chérubin et Thérèse… Quant à l’Art de l’écriture vocale, il le manie avec une habileté et une pertinence rarement égalées. Mais là encore, Massenet ne se contente pas de suivre les préceptes coutumiers qui font du texte le fondement et la justification de la mélodie. A l’instar de Schumann et Brahms, il s’imprègne de l’atmosphère générale du texte puis se détache des mots eux-mêmes pour construire d’abord l’atmosphère musicale. Massenet n’est-il pas, avec le recours au parlé-chanté dans des cycles de mélodies comme le Poème du Souvenir ou les Expressions Lyriques, ainsi que ses opéras Amadis, Ariane, Thérèse et Bacchus l’annonciateur du Sprechgesang de Schönberg dans son Pierrot lunaire (1912) ?

En somme, Massenet s’affirme comme le compositeur d’un éclectisme et d’une fluidité musicale tournés vers l’avenir, aux confins du Naturalisme et de l’Impressionnisme. A l’encontre de ce que d’aucuns ont bien voulu en dire, il n’est pas le compositeur d’un siècle qui s’achève, mais bel et bien celui d’un siècle qui commence.

 

Introduction de la conférence par Nicolas DESHOULIERES,
Musicologue et Conseiller aux études au Conservatoire du 9ème arrondissement de Paris

 

Hervé OLEON, artiste lyrique et musicologue, est l’auteur de nombreuses publications sur Massenet, son œuvre et son entourage musical. Il a publié récemment Lucy Arbell, voix d’ombres et de lumière, biographie de la dernière égérie de Massenet (Res Lyrica, Paris, 2017). Il est également co-auteur, avec Mary Dibbern, du Catalogue général des œuvres de Massenet (édition bilingue, Pendragon Press, New-York, 2016). Depuis 2015 il est rédacteur en chef de la revue annuelle de l’Association Massenet Internationale, organisation dont il est vice-président. Expert près la Cour d’Appel de Paris pour les questions de Droit d’Auteur liées à la Musique française des 19ème et 20ème siècles, il est en outre sollicité comme consultant par le Lyric Opera de Chicago et l’Atelier Opera de Toronto. Il est l’auteur de présentations d’œuvres pour le Liceu de Barcelone (Werther, 2017) et Marseille (Hérodiade, 2018). Il a par ailleurs rédigé des livrets d’accompagnement pour la firme anglaise Somm Recordings (distribuée par Naxos, Mélodies d’Ange Flégier, Schwarz- Dibbern, 2016, 3e volume des Mélodies de Massenet, Silver-Bonynge, à paraître). En qualité de conférencier, il est invité par le Musée Européen Yvan Tourguéniev, la Bibliothèque historique de Pologne à Paris, l’Ecole Normale de Musique de Paris et le Festival d’Art lyrique Pézenas enchantée.

 

Association MASSENET Internationale
2, rue de la Poudrière, 61400 MORTAGNE-AU-PERCHE http://www.jules-massenet.fr

 

 

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